Dr Shari Parker,
Médecin généraliste et spécialiste de la rééducation, présidente de la World Albinism Alliance (Alliance mondiale pour l’albinisme), et secrétaire de l’Albinism Fellowship of Australia (Association australienne de l’albinisme)
En grandissant, le docteur Shari Parker voulait se prouver à elle-même et au reste du monde qu’elle n’était pas “différente”. Son parcours est un cheminement gratifiant vers l’acceptation et la réussite personnelle et professionnelle.
Faites la connaissance de Shari Parker
Les premières années
Je m’appelle Shari Parker. Je suis une personne vivant avec l’albinisme. J’ai les cheveux et la peau d’une couleur blanc laiteux et je suis aveugle au sens de la loi. Je vis à Sydney, en Australie, ville célèbre pour son opéra et pour son pont sur la baie. Je suis mariée, j’ai trois enfants, et je suis médecin spécialisé.
J’ai eu la chance de grandir dans une famille où j’étais acceptée pour ce que j’étais, avec mon albinisme et tout le reste. On m’a toujours encouragée à exceller. Ma sœur aînée, atteinte elle aussi d’albinisme, a été mon mentor, un modèle de courage et une source d’inspiration. Ma famille acceptait mon albinisme mieux que je l’aurais fait moi-même.
Enfant, j’avais du mal à comprendre ce que signifiait être atteint d’albinisme. Quand je sortais du cadre protecteur de ma famille, je recevais mon lot d’insultes, de “Casper” à “tas de neige”, en passant par “elle est aussi aveugle qu’une chauve-souris”. Les instituteurs disaient à mes parents que je ne devais pas aller à l’école avec des “enfants normaux”, et certains parents interdisaient à leurs enfants de jouer avec moi.
Je ne leur en voulais pas, mais je gardais tout pour moi. Je me sentais profondément différente, pire, une moins que rien. Je ressentais de la colère et du dépit d’être née malvoyante, avec un teint d’une pâleur cadavérique. Cette profonde angoisse était une étape importante, quoique douloureuse, dans mon cheminement vers ma propre compréhension et acceptation de moi-même, et son écho me hante encore parfois aujourd’hui.
Résolution
Finalement, mon incertitude s’est transformée en une grande détermination à ne pas me laisser définir en fonction de ma maladie. Je suis devenue plutôt obstinée, entêtée et dogmatique. J’ai décidé de ne pas laisser cette maladie, cette mutation génétique, ce handicap, pas plus que l’attitude des autres vis-à-vis d’elle et de moi, limiter ou définir mon identité.
Comme je ne supporte pas du tout le soleil, je passais mon temps à la bibliothèque de l’école pendant la pause de midi, et c’est ainsi que j’ai réalisé que j’étais douée à l’école. J’ai opté pour la carrière la plus improbable pour quelqu’un d’aveugle au sens de la loi : j’ai décidé de devenir médecin.
Mon parcours pour devenir médecin spécialiste alors que j’ai une vision limitée n’a pas toujours été facile, mais mes autres sens ont été mes meilleurs alliés, en plus de ma capacité de compassion, de connexion et de compréhension du véritable impact de la maladie ou de la blessure sur les personnes.
J’ai obtenu mon diplôme avec mention et j’exerce la profession de médecin depuis près de 15 ans ; j’ai également suivi une formation complémentaire pour me spécialiser dans la rééducation ; je travaille depuis 6 ans avec des personnes handicapées, dépassant le reste de l’Australasie en matière d’examens cliniques spécialisés.
Aujourd’hui, je suis très occupée et ma vie est bien remplie. Entre mon travail de médecin conseil dans un grand hôpital de soins tertiaires, mon travail d’enseignante dans deux universités, et ma vie d’épouse et de mère de trois jeunes enfants, je n’ai guère de temps libre dans la journée. J’ai le privilège de travailler comme bénévole auprès du groupe local d’entraide pour les personnes atteintes d’albinisme, et de participer à la création de la World Albinism Alliance, qui rassemble des organisations de défense des personnes atteintes d’albinisme du monde entier oeuvrant ensemble en faveur d’objectifs communs.
Aspirations en matière de droits de l'homme
Accepter soi-même son albinisme est la condition sin qua non à son acceptation par les autres, et je continue personnellement de m’y efforcer tous les jours.
Mon plus sincère espoir et mon rêve, c’est que chaque personne atteinte d’albinisme dans le monde, quels que soient son patrimoine, sa situation socioéconomique, son environnement culturel, sa religion et son genre, puisse apprendre à connaître et à comprendre vraiment son albinisme, trouver les mots pour le décrire aux autres, et avoir la liberté d’être soi-même sans crainte mais avec fierté.